Depuis le mois de novembre, de nombreux artistes français se sont mis au concert en livestream payant, avec une production complète, un réalisateur et une billetterie à l’entrée.
La pratique se professionnalise de plus en plus : fini les lives dans la cuisine. A chaque fois, comme avec un concert en configuration dite normale, les ingrédients de production sont les mêmes et le résultat fonctionne plus ou moins bien, selon l’univers de l’artiste. En décembre dernier, LivexLive a même organisé la première cérémonie récompensant les meilleurs livestreams, The Lockdown Awards…
Tour d’horizon en France
Le 08 décembre, c’est Matt Pokora qui a investi la Seine Musicale à Boulogne-Billancourt pour le concert livestream de sa tournée, annulée au printemps 2020, “Pyramide Tour.” Résultat : plus de 20 000 places vendues et près de 60 000 spectateurs qui ont pu assister à ce concert depuis chez eux, grâce à Omnilive. Cyril Zajac, PDG d’Omnilive, a décrypté dans une interview à Culture Matin, la tendance du livestream. Cet événement donne désormais le ton en France, et les médias français citent cet événement, très réussi, comme référence du genre.
Plus tard, le 13 décembre, Jennifer s’est également produite en direct de l’Olympia. Plus de 20 000 spectateurs se sont connectés pour ce concert, diffusé par InLive Stream et capté par Omnilive, pendant lequel l’artiste, en plus du traditionnel concert, a emmené les fans qui avaient acheté le billet VIP à 25€, dans les coulisses de l’Olympia. Par ailleurs, pendant le show, des fans étaient présents sur scène via des écrans interposés et la chanteuse a pu interagir avec eux.
Le 5 janvier, le concert-événement de Jean-Michel Jarre, retransmis à l’occasion du réveillon de la nouvelle année depuis Notre-Dame de Paris avec VRrOOm, “Welcome to the Other Side”, comptabilisait plus de 75 millions de vues : un record ! Au même moment, c’est David Guetta qui s’est produit en direct depuis le Louvre, au profit de l’Unicef et des Restos du Cœur, a attiré 16 millions de spectateurs.
Ce qui ressort de ces expériences citées, et de toutes les autres, c’est que, lorsque le concert en livestream est de qualité au niveau technique et scénique (comme un concert physique…) et propose des contenus à valeur ajoutée (merchandising ou contenus exclusifs), les fans sont au rendez-vous. Beaucoup de fans. Le livestream a en effet la capacité de réunir à un même moment et un même endroit des fans qui n’auraient potentiellement pas pu se rendre à un événement physique à cause de leur éloignement géographique, de problématiques de transports en commun ou de garde d’enfants ou encore, du non-accueil de personnes en situation de handicap dans certains lieux culturels.
Et avec cette démultiplication des spectateurs, la formule mathématique change aussi. Désormais, il est possible avec le livestream de réunir autant de fans en une représentation qu’en une tournée complète.
Mais quid des droits ?
Si les revenus de billetterie peuvent être multipliés en une seule performance, ce n’est pas le cas des droits. Et avec l’explosion de ce nouveau format, les organismes de gestion collective ont dû s’adapter très vite pour proposer une tarification adaptée.
En France, depuis le 1er janvier, les artistes peuvent déclarer leur concert en ligne à la Sacem. Les programmes et attestations papier sont définitivement supprimés. Interviewée par NewsTank Culture, Cécile Rap-Veber, directrice des licences, de l’international et des opérations de la Sacem, a également expliqué le système de tarification. « Pour le live, en temps normal, la tarification de la Sacem est de 8,8 % des recettes générées par le producteur. Pour le streaming, nous sommes entre 12 et 15 % des recettes des plateformes. (…) Il y a des différences entre un concert en salle et un livestream, qui justifient une différenciation de nos tarifs ». Pour exemple, PRS, l’organisme de collecte de droit britannique applique un taux de 4,2% sur les recettes d’un concert physique. Pour les concerts en livestream, une tarification de 8% est appliquée pour les événements qui génèrent plus de 50 000 livres, et de 17% pour ceux qui génèrent plus de 450 000 livres. Une dépense supplémentaire à prendre en compte dans les frais de production.
Et la suite ?
Pour plusieurs acteurs du spectacle vivant, les concerts en livestream vont donc se pérenniser même lorsque les concerts en configuration normale reprendront. Pour Romain Pasquier, directeur général du label WEA (le département international de Warner), interrogé par Les Echos, « le futur appartient sans doute aux solutions hybrides », avec un concert physique avec public retransmis en direct. Reste à savoir si la formule fonctionnera, lorsqu’un artiste performera pour un public physique, au risque d’oublier son public virtuel…
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Crédit photo : InLive / Omnilive