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[Marketing] Touche pas à mon théâtre

Le Theatre Royal de la ville de Windsor (à l’ouest de Londres dans le comté de Berkshire) est en proie à de nombreuses difficultés financières depuis plusieurs années au point d’être au bord de la fermeture. Malgré les nombreux messages de soutien des clients et abonnés de ce théâtre mythique qui a fêté ses 100 ans en 2011, ce dernier n’arrive plus à faire face à ses difficultés.

En effet, une représentation a besoin de remplir la salle au minimum à 50%  pour être rentable. Malheureusement, la plupart d’entre elles ne dépasse pas les 20/30% de remplissage. Le propriétaire Bill Kenwright ne ménage pas ses efforts pour convaincre les habitants de Windsor de venir (ou revenir) dans son théâtre. « Si vous n’avez pas visité le Theatre Royal avant, venez voir ce que l’on a vous offrir. Et si vous étiez déjà venu, n’hésitez pas à revenir » répète-t-il dans la brochure du théâtre.

II n’a pas hésité non plus à mettre en place une politique attractive de billetterie en offrant carrément aux nouveaux clients des billets gratuits (pour certaines représentations seulement) et des billets demi-tarifs pour les autres spectacles. Les spectateurs réguliers se sont vus quant à eux offrir également des billets demi-tarifs pour deux représentations à condition d’amener avec eux un nouveau spectateur pour qui ça sera gratuit les deux fois.

L’idée est bien sûr d’attirer les nouveaux clients avec des offres attractives voire de la gratuité dans un premier temps, afin de leur donner envie de s‘abonner et de payer (plein pot cette fois) les futures représentations. Le Theatre Royal ne manque vraiment pas d’atouts pour être rentable : sa brochure est l’une des plus attractives de Grande-Bretagne avec beaucoup de têtes d’affiches pour un lieu relativement petit.

Cette question de la rentabilité se pose également en France et notamment à Paris où les fermetures de salles se sont multipliées ces dernières années. Le secteur culturel et artistique est soumis comme tous les autres secteurs aux aléas du marché et à la dure loi de la rentabilité. Les directeurs de salles se doivent de se montrer créatifs s’ils veulent attirer des spectateurs et rentabiliser leur billetterie. Car si les théâtres publics bénéficient de subventions importantes de la part de l’Etat, ce n’est pas le cas des théâtres privés dont le modèle économique est plus fragile. Certains innovent, comme les Bouffes du Nord (public) qui a tenté pour la première fois en 2011 la voie du mécénat. Le principe: un traitement VIP pour les spectateurs qui donnent 3.000 euros (dont 1.000 euros déductibles des impôts) pour financer un opéra. Du côté du privé, les théâtres ont trouvé une solution pour parer aux mauvais coups : ils versent une quote-part de leurs revenus à l’Association pour le Soutien du Théâtre Privé (6,8 millions d’euros en 2010), qui utilise ces fonds pour fournir des avances ou amortir les déficits. Une sorte de mécanisme de régulation où les succès soutiennent les échecs. Toujours dans la même idée, on peut aussi penser à l’initiative de ce théâtre espagnol qui avait développé l’application PayPerLaugh. Pour pallier la baisse historique de la fréquentation des théâtres dans le pays, le théâtre Neu (Barcelone) avait décidé de ne faire payer les spectateurs qu’à partir du moment où ils souriaient, ceci grâce à un système de reconnaissance faciale qui détectait les sourires sur les visages des spectateurs. Cela avait permis d’augmenter la fréquentation de 35%.

Espérons qu’avec ces nouvelles stratégies associées à la montée du yield management (adaptation du prix d’une prestation en fonction du moment et du segment de clientèle) et des billetteries participatives (proposer au futur spectateur de réserver sa place pour un évènement qui n’aura lieu que si un nombre suffisant de pré -réservations sont enregistrées sinon l’évènement est annulé et le spectateur remboursé), les salles de théâtres retrouvent leur prestige d’antan et échappent à ce que les directeurs de salles redoutent le plus : le tombé de rideau définitif.

Crédit : Google Street / Theatre Royal

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