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La billetterie secondaire au Royaume-Uni déclarée « viable et rentable » par un rapport indépendant

Suite au Consumer Right Act qui encadre le marché secondaire de la billetterie depuis octobre 2015, et la pétition #ToutsOut, initiée par des artistes, qui demande au gouvernement de réexaminer la législation, un rapport, réalisé par Michael Waterson, professeur d’économie, a été publié.

Le rapport indépendant des mesures de protection du consommateur concernant le second marché de la billetterie en ligne, demandé par le gouvernement, était très attendu à la fois par les professionnels du spectacle qui demandaient pour certains l’interdiction de la revente de la billetterie, ainsi que par des plateformes de revente en ligne comme Viagogo ou StubHub.

Michael Waterson a consulté des organisateurs d’événements, des représentants du secteur de la billetterie, des parlementaires et des représentants de consommateurs pour faire un état des lieux du marché secondaire et donner plusieurs recommandations pour réguler la billetterie au Royaume-Uni.

Si Michael Waterson a trouvé des « preuves évidentes de problèmes » au sein du marché de la billetterie au Royaume-Uni, et souligne les dommages causés par le marché secondaire sur l’industrie culturelle (perte de contrôle sur les prix, pas de données clients, profit qui ne va pas aux organisateurs et artistes, etc.), les plateformes de revente sont considérées comme « des services viables et rentables », dont les vendeurs et les spectateurs bénéficient. A noter que le rapport fait clairement la différence entre de la revente occasionnelle (lorsqu’un spectateur ne peut se rendre à l’événement pour quelques raisons) approuvée et encouragée, et la revente habituelle et professionnelle de billets, dans le seul but de profit, qui impliquent l’usage de bots, interdits par la loi.

Plus de transparence pour les billetteries secondaires et les organisateurs d’événements

Le rapport reconnaît des manquements au Consumer Rights Act de la part des plateformes de revente, qui doivent clarifier leur offre et appliquer de manière plus rigoureuse la loi en cours. Il recommande de faire appel à la National Trading Standards, l’autorité gouvernementale en charge des normes au Royaume-Uni, pour mener à bien une enquête de conformité sur ces sites de revente, et mettre en place un processus standardisé sur ces plateformes pour les vendeurs, afin qu’ils puissent prodiguer toutes les informations obligatoires par le Consumer Rights Act (numéro du siège, valeur faciale du billet, etc.)

Le rapport appelle également les plateformes à identifier certains vendeurs comme des commerçants professionnels, et à les signaler aux consommateurs.  Si les sites de billetterie secondaires ne parviennent pas à identifier ces revendeurs, le gouvernement devrait envisager l’introduction d’une licence, pour encadrer les revendeurs, pratique déjà en cours à New York.

Michael Waterson met également en avant les liens entre le marché primaire et le marché secondaire. Selon lui, 85 à 90% des billets ont déjà été distribués (VIP, invitations, partenaires, etc.), lorsque les billets sont mis en vente. Il cite également des sources orales qui expliquent que certains producteurs mettent en vente des quotas de billets directement sur des plateformes de billetterie secondaire, à des prix plus élevés.

Le rapport fait donc des recommandations pour les organisateurs d’événements pour éviter le marché secondaire, comme clarifier les conditions de vente de billet, avec une liste détaillée des distributeurs et le moment de la mise en vente. Le rapport recommande la formation d’un groupe de projet, composé d’organisateurs d’événements et de billetteries primaires, pour examiner et standardiser la façon dont ces informations pourraient être affichées.  

Selon Waterson, le vrai problème de la billetterie secondaire se situe dans l’usage de bots pour acheter des quantités massives de billets. Les bots « privent les consommateurs de la possibilité de se rendre à un événement à un prix juste, établi par l’organisateur de l’événement. Ce prix peut même avoir été fixé à des niveaux plus faibles que prévu, pour justement favoriser l’accès des événements au plus grand nombre. » L’usage de bots est interdit par la loi, mais la législation concernée n’a encore jamais été appliquée, compte tenu de la difficulté de retrouver les responsables. Le rapport recommande aux plateformes de billetterie primaire de se protéger contre les attaques de ce type, et d’utiliser tous les moyens disponibles (captcha, standardisation du billet nominatif, etc.) pour réduire les cas de fraude.

Finalement, le rapport ne recommande pas l’interdiction de la revente de billets qui reléguerait la billetterie secondaire au marché noir, et n’est pas favorable pour le plafonnement du prix de la revente, inutile et difficile à gérer. En revanche, Waterson préconise l’utilisation de stratégies de yield management, pour réguler les prix, satisfaire les spectateurs, et éviter la revente spéculative.

Des réactions mitigées pour les professionnels du secteur

Le parlementaire Sajid Javid, à l’origine de ce rapport, a fait un bon accueil du rapport Waterson « qui met les spectateurs au premier plan. […] C’est maintenant aux Secrétariats d’Etat des Affaires et de la Culture de faire en sorte que toutes ces recommandations soient mises en place. »

Les producteurs et organisateurs d’événement ont réagi : s’ils sont ravis que le rapport mette en évidence le fait que le Consumer Rights Act ne soit pas respecté, ils regrettent que « la conclusion globale soit que l’industrie a besoin de s’auto-réguler. C’est ce qu’on nous dit depuis plus de 10 ans, les spectateurs continuerons à se faire escroquer. »

Richard Davies, fondateur de Twickets, une plateforme d’échange de billets entre fans déclare : « Idéalement, nous aurions voulu que le rapport aille plus loin concernant la protection des spectateurs. Il reconnaît que la spéculation sur les prix des billets empêche les spectateurs de se procurer des billets, et pourtant le rapport ne recommande pas le plafonnement des prix de revente. De plus, le rapport accuse les organisateurs de créer les conditions parfaites pour le marché secondaire. A notre avis, la seule manière de protéger correctement les fans est d’interdire la revente pour le profit, ce qui est mis en œuvre dans d’autres pays, et a été réalisé avec succès pour les Jeux Olympiques de Londres. »

Seule à commenter, la plateforme de billetterie secondaire StubHub a déclaré : « Nous remercions le professeur Waterson d’avoir reconnu les bénéfices de la billetterie secondaire pour les spectateurs, ainsi que sa décision de rejeter une nouvelle législation à ce stade, notamment concernant le plafonnement des prix et l’interdiction de la revente de billets. »

Finalement, Andrew Thomas, consultant senior de The Ticketing Institute a également bien accueilli cette demande de transparence sur le marché. Mais selon lui, la politique de non remboursement et de non échange est « la chose la plus obsolète possible dans le secteur de la billetterie », et mérite d’être repensée en profondeur.

Crédit : DR

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