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Conseil en billetterie Juridique

[Juridique] Que faire en cas de fraude de la billetterie ?

L’objectif des chroniques juridiques est d’informer les organisateurs, les acteurs du ticketing et les spectateurs de leurs droits et de leurs obligations.

En Septembre 2002, trois employés ou anciens employés (deux magasiniers et un informaticien) de la Fnac étaient arrêtés par les enquêteurs de la sûreté départementale pour avoir fait des faux billets à l’occasion d’Urban Peace, le grand concert rap du Stade de France ; de magnifiques billets fabriqués sur la base de la billetterie de la Fnac qui avait été pour l’occasion délestée de plusieurs prototypes. La police a saisi chez les trois faussaires près de 1500 € qui ne représentaient que les fruits partiels de leur petite affaire.

En 2006, un autre scandale éclatait concernant la vente de faux billets pour le concert de Madonna à Prague et les policiers praguois interpellaient quatre individus et saisissaient, lors de perquisitions, les 300 faux billets, le matériel qui avait servi à la fabrication et pour près de 500 000 couronnes (20 000 €).

Début Juillet 2013, il y a quelques semaines à peine, le groupe One Direction était aussi victime de la vente de faux billets mais de faux billets réalisés en ligne cette fois. 34 Fans se sont vus refuser l’entrée au concert alors que pour la plupart d’entre eux ils s’étaient acquittés d’un prix bien supérieur au prix de vente officiel. Certains fans désespérés sont même allés jusqu’à poster des vidéos d’eux effondrés, en larmes.

Chagrin de Fan mais pas seulement ; la fraude dans le domaine de la billetterie porte préjudice à tous les acteurs de la filière : aux spectateurs bien sûr mais aussi aux producteurs, aux organisateurs et aux acteurs du ticketing ; un préjudice à la fois moral et financier.

Pour rappel :

La loi n°2012-348 interdit « le fait de vendre, d’offrir à la vente (…) des titres d’accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant, de manière habituelle et sans l’autorisation du producteur, de l’organisateur ou du propriétaire des droits d’exploitation de cette manifestation ou de ce spectacle ». Cette infraction, introduite dans le code pénal, est punie d’une amende de 15000 euros.

Et la fraude ne s’arrête pas à la fabrication et à la vente de faux billets, sont concernées aussi les reventes illégales, de plus en plus nombreuses, de vrais billets à des prix exorbitants.

L’année prochaine verra la coupe du monde de Football au Brésil et les deals en tout genre vont déjà bon train à l’image des faux billets qui circulaient pour le match France-Portugal en 2001.

Alors que faire face au développement croissant de la fraude que ce soit en France ou à l’international ?

En matière de fraude il n’y a malheureusement que deux solutions : la prévention et/ou l’attaque. Et c’est sur ces deux terrains que je vais vous donner quelques moyens d’action.

Avant tout : il vaut mieux prévenir que guérir !

Certains individus et sites Internet se sont spécialisés dans la vente de faux tickets ou dans la revente illégale de vrais billets que ce soit dans le domaine du spectacle, de la culture ou du sport : alors la vigilance reste le maître mot.

Les précautions à prendre en tant qu’organisateur :
– effectuez vous-même la commercialisation de la billetterie ou confiez cette tâche à des distributeurs réseaux spécialisées ou grandes enseignes sérieux ou encore aux exploitants des lieux de représentation disposant d’un point billetterie ;
– privilégiez la création de billets difficilement falsifiables numérotés avec hologramme ;
– conformez-vous à la loi et déclarez au service des impôts dont vous dépendez les billets – tickets d’entrée dans les 8 jours qui suivent leur livraison en précisant les noms et adresses des exploitants destinataires, le nombre et les numéros des fonds de billets (cette déclaration sera indispensable en cas de contentieux) ;
– si vous êtes exploitants de spectacles et que vous achetez vos billets directement à l’étranger n’oubliez pas que vous êtes considérés comme importateurs et astreints aux déclarations prévues à l’article 50 sexies F de l’annexe IV du CGI (Code Général des Impôts) ;
– pour lutter contre les fraudes et les abus du « marché noir » mettez en place des systèmes de guichets de revente physiques sous votre contrôle qui permettront aux spectateurs de revendre et d’acheter leurs billets directement sur le lieu de la manifestation.
C’est ce que vient de faire le Festival des Vieilles Charrues cette année.

Pour rappel :
Extrait de l’article 50 sexies F de l’annexe IV du CGI 
« (..)Chaque partie du billet, ainsi que la souche dans le cas d’utilisation de carnets, doit porter de façon apparente ou sous forme d’informations codées :
1° Le nom de l’exploitant ;
2° Le numéro d’ordre du billet ;
3° La catégorie de la place à laquelle celui-ci donne droit ;
4° Le prix global payé par le spectateur ou s’il y a lieu la mention de gratuité ;
5° Le nom du fabricant ou de l’importateur si l’exploitant a eu recours à des carnets ou à des fonds de billets préimprimés.

Si les billets comportent des mentions codées, le système doit permettre de restituer les informations en clair.
Les billets provenant d’un carnet à souches ou émis sur des fonds de billets préimprimés doivent être numérotés suivant une série ininterrompue et utilisés dans leur ordre numérique. (…)
Les billets émis par le biais de systèmes informatisés doivent comporter un identifiant unique mémorisé dans le système informatisé.
Chaque billet ne peut être utilisé que pour la catégorie de places qui y est indiquée.

Les précautions à prendre en tant que spectateur :
– informez-vous au préalable des réseaux de distribution homologués dans les pays visés par la vente des billets qui vous intéressent ;
– familiarisez-vous avec le design des billets des principaux réseaux de vente ayant pignon sur rue ou sur Web, que ces réseaux soient français ou étrangers ;
– évitez d’acheter des billets aux particuliers ;
– n’achetez pas vos tickets sur les sites d’enchères et les plates-formes d’échange de tickets ;
– consultez au préalable les listes noires des revendeurs de tickets publiées sur plusieurs sites en Europe pour éviter les escroqueries
(Exemple : I love my ticket pour la Belgique) et tenez-vous informez sur le site de la répression générale des fraudes et sur les sites de défenses des consommateurs.

Si le mal est déjà fait : faites le savoir et agissez car cela peut servir !

Prévenir parfois ne suffit pas et malgré toutes les précautions prises, vous pouvez être victime de la fraude.
Que vous soyez spectateurs, producteurs, organisateurs ou acteurs du ticketing ; une fois le préjudice subi; il n’y a que deux choses à faire :

1 – Constater et informer :
Votre premier réflexe doit être de faire constater la fraude et d’en informer au plus vite les autres personnes qui pourraient être concernées directement (spectateurs – organisateurs – exploitants) ou indirectement (répression générale des fraudes – associations de défense des consommateurs – forums de consommateurs).

2 – Déposer plainte :
Votre deuxième action sera de déposer plainte auprès du commissariat ou de la gendarmerie dont vous dépendez.

Même s’il est parfois difficile de poursuivre certains escrocs (par définition peu scrupuleux), surtout lorsqu’ils officient via Internet ou dans d’autres pays, le fait d’avoir déposé plainte permettra de mieux organiser votre action dans le cadre d’un éventuel contentieux qui pourra déboucher sur le paiement d’amendes et de dommages-intérêts.

Comme il n’existe pas en droit d’incrimination spécifique réprimant la fraude, il faudra se reporter aux articles du Code pénal qui sanctionnent l’escroquerie et le faux en écriture.

Pour rappel :
L’article 313-1 du code pénal dispose que « L’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. 
L’escroquerie est punie, en sa peine maximum, de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende.

Crédit : Michelle JEAN-BAPTISTE © 24 Juillet 2013

Michelle JEAN-BAPTISTE est avocate et  business developper spécialisée en droit des affaires et en droit des médias (audiovisuel/Internet/télécom). Après avoir travaillé comme  manager pour des SSII, des sociétés de production audiovisuelle et pour le CNAM, en 1997, elle crée  MJB Consulting – Top&Win société de conseil et de formation spécialisée dans l’accompagnement des entreprises en France et à l’international.

Parallèlement, elle intervient en tant que conférencière et modérateur de tables rondes  sur les questions liées au droit des entreprises, au droit du E Business, droit de l’Internet, droit d’auteur, droit de l’audiovisuel, droit des marques ainsi que sur la négociation et les affaires internationales. Références : ESCP Europe, Novancia (ex Advancia Negocia) – ISC Paris – Dauphine –  ISTEC – EFREI – HETIC – Ecole de l’Image des Gobelins – CIFAP – Ecole Louis Lumière

Elle est aussi depuis 2005 coach et conférencière en droit des affaires et en négociation à l’international à l’incubateur de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris ainsi qu’à l’incubateur ProLab des Gobelins.

Michelle JEAN-BAPTISTE est aussi chroniqueuse juridique sur la Webradio Widoobiz et l’auteur de plusieurs ouvrages :

– « Créer et exploiter un commerce électronique  » chez Litec en 1997 (Prix AFDIT 1998 Association Française du Droit de l’Informatique et des Télécoms)
– « Marketing on Line, guide pratique et juridique », (éditions d’Organisation, 2008) Prix des DCF 2008 (Dirigeants commerciaux de France) coécrit avec Philippe Jean-Baptiste et préfacé par Serge Soudoplatoff
– « Entreprise, mode d’emploi » (Larousse, 2009) ouvrage collectif sous la direction d’Emilie Devienne
– « Développer une activité e-Commerce » (Nathan, 2010) ouvrage collectif sous la direction de Xavier Bouvier
– « Réussir grâce aux réseaux sociaux » coécrit avec Hervé Lassalas et préfacé par Joël De Rosbay (Larousse Avril 2011)
– « Développer une activité e-Commerce » 2ème édition revue et augmentée (Nathan, Juin 2012) ouvrage collectif sous la direction de Xavier Bouvier
– « Communiquer sur les réseaux sociaux » partie juridique de l’ouvrage collectif dirigé par Xavier Bouvier (Nathan Les Echos Octobre 2012)

Cursus :

Doctorat en Droit et management des médias – Cambridge (UK)
Avocate en droit des affaires et en droit du E Business et de l’innovation (NY-USA)
DEA Droit et gestion de l’entreprise – Paris IX Dauphine
Double Maîtrise de droit des affaires Internationales – Paris I Panthéon Sorbonne
Licence de la Chambre de Commerce Franco-Britannique
Diplôme de l’Institut de Droit comparé – Paris II Panthéon Assas
Dulco de Chinois – INALCO

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