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L’avenir des compétitions esport : de la structuration des ligues à un système franchisé

L’esport évolue, il s’organise et se restructure au fil des saisons. Son expansion, rapide, a poussé les éditeurs et les organisateurs de compétitions à innover dans la construction de leur modèle compétitif, au travers de ligues (ouvertes ou fermées) ou via d’autres solutions afin de consolider l’écosystème esportif. Ainsi, les compétitions de jeux vidéo s’organisent selon des politiques bien différentes, d’un éditeur plutôt souple avec l’utilisation de son jeu, à celui imposant des règles strictes. Compte tenu de ces évolutions nombreuses et rapides, nous avons voulu dresser un état de l’art de la situation actuelle afin de mieux cerner les perspectives d’avenir quant à la structuration des compétitions d’esport.

Focus sur la structuration des compétitions de jeux vidéo par les acteurs du secteur :

L’organisation et la structuration des ligues

L’esport est composé de plusieurs catégories de jeux, de plusieurs jeux dans ces catégories, de compétitions diverses et variées et de différentes catégories d’acteurs : joueurs, éditeurs, fans, organisateurs de compétitions, équipes etc. Le champ d’étude de l’esport est par conséquent large et varié. Il est donc complexe d’harmoniser toutes ces catégories, d’autant plus que la propriété des jeux vidéo revient, selon le droit de la propriété intellectuelle, à l’éditeur ayant été à l’initiative de la licence. Le jeu vidéo est un objet de droit, appréhendé par le droit privé et la propriété intellectuelle. Il est donc détenu par ses créateurs, l’éditeur, à l’initiative de la création. C’est un des enjeux de l’encadrement juridique, nous y viendrons dans les prochains articles. Mais sans jeu vidéo, pas de pratique vidéoludique et donc pas d’organisation de compétitions. C’est pour cela que les éditeurs prennent les choses en main, chacun à sa manière. Car chaque jeu a plus ou moins son mode d’organisation des compétitions propre et l’éditeur tente plus ou moins de s’adapter à certaines contraintes pour améliorer le système compétitif. 

La différence la plus flagrante, s’opère entre Riot Games, éditeur de League of Legends et Valve, éditeur de DotA 2. Il est intéressant d’étudier les méthodes de ces deux éditeurs sur ces jeux car ce sont tous les deux des MOBA (Multiplayer Online Battle Arena) : ils ont donc sensiblement les mêmes mécaniques de jeu. Pourtant, les compétitions organisées autour de ces derniers sont bien différentes ! Là où Riot Games opte pour une approche très stricte, sans organisateur tiers et avec un système de compétitions pyramidales avec des ligues régionales (la LFL pour la France, le LEC pour l’Europe ou les LCS pour l’Amérique du Nord par exemple) pour aboutir à un Championnat du Monde unique ; Valve, quant à lui, opte pour un système très ouvert avec des organisateurs tiers qui organisent plusieurs tournois majeurs (appelés Majors et faisant penser aux Grands Chelems au tennis) dans l’année. Valve n’avait, jusqu’à il y a quelques semaines, pas de ligue réellement structurée. Mais petit à petit et au regard de la croissance exponentielle de l’esport, le secteur change de visage. Valve a notamment fait savoir que des ligues régionales allaient être créées sur le jeu DotA 2 [1], suivant donc le modèle de Riot Games. 

De la même manière, la crise sanitaire a fait évoluer les choses sur d’autres jeux de l’éditeur : la Pro League de Counter-Strike : Global Offensive, gérée par l’organisateur ESL a totalement réadapté son format en créant des ligues régionales, tout en conservant l’idée des Majors [2]… Même quand l’organisation de compétitions est déléguée à des organisateurs tiers, la régionalisation des ligues apparaît comme un modèle propice à la bonne structuration de l’écosystème esportif. Pour mieux s’y retrouver et éviter les problèmes ? Rien n’est moins sûr…

Ubisoft, éditeur de Rainbow 6 Siege, prévoit une restructuration complète de son circuit[3]. L’éditeur est actuellement en phase de transition vers des ligues régionales, lui aussi, mais peine à faire l’unanimité. Ubisoft avait en effet annoncé une régionalisation de son circuit, débouchant par la suite, sur des Majors (à l’image de CS:GO donc). Pourquoi ? Pour préserver un système ouvert donnant sa chance à chacun ; remettre la main sur son circuit ; professionnaliser et stabiliser le système compétitif, surtout, les ligues nationales permettant d’accéder à la ligue régionale. On ne peut que louer cette volonté de réorganisation de la part de l’éditeur, ne serait-ce qu’au regard de la précarité de certaines scènes esportives. Cependant, si en Europe cette restructuration passe bien, ce n’est pas le cas de l’autre côté de l’Atlantique ![4]

En parallèle de toutes ces structurations, une scène compétitive est en train de se créer de toute pièce : Valorant, nouveau jeu de Riot Games, FPS, connaît un succès incroyable. Les tournois se multiplient sur le jeu ; de nombreux joueurs, même professionnels, se tournent vers la licence ; des équipes se créent avant même que le jeu ne soit officiellement sorti. Devant un tel engouement, l’éditeur a pris les devants et a déjà abordé la scène compétitive du jeu. Dans un premier temps, Riot Games tient à assurer l’intégrité sportive, avec une large accessibilité et ce, en construisant la scène compétitive à partir de la communauté, tout en laissant la possibilité à des organisateurs tiers de prendre la main sur le futur du circuit. L’éditeur a d’ailleurs mis en place un « guide des compétitions » [5]. Alors quelles compétitions seront organisées ? Majors à l’image de CS:GO, FPS également, ou ligues régionalisées à l’image de ce que l’éditeur sait faire ? Le choix des organisateurs de compétitions sera déterminant. 

 

Mais alors pourquoi est-ce si important de structurer les compétitions ? 

Pour la professionnalisation du secteur, la stabilité et la rentabilité de ce dernier. Un exemple concret de nécessaire structuration, c’est ce que connaît la scène Rocket League à l’heure actuelle : plusieurs équipes faisant partie de la scène RLCS (Rocket League Championship Series) ont adressé à son éditeur, Psyonix, qui gère également la scène compétitive, une lettre concernant les difficultés auxquelles elles font face, comme le relate Kevin Hitt dans un article publié le 15 mai dans la revue The Esports Observer [6]. Les difficultés rencontrées ? Le calendrier d’annonce des compétitions, la redistribution des cashprizes et la monétisation de la ligue, entre autres. Lire la suite >>

Source : LinkedIn – Auteur : Bertrand PERRIN – Responsable de LEVEL 256, plateforme esport / Head of esport program chez Paris & Co

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